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Plus de la moitié des experts de l’autorité de sécurité alimentaire de l’UE ont des conflits d’intérêts
par Fil d’infos et actualité - 23 novembre 2013

Près de 60 % des experts siégeant dans les panels de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont des liens directs ou indirects avec les industries réglementées par l’agence , selon une enquête indépendante effectuée par Corporate Europe Observatory (CEO) et la journaliste indépendante Stéphane Horel.

Source : Corporate Europe Observatory (CEO)
Traduction : Réseau Environnement Santé

Le rapport « Unhappy meal. Le problème de l’indépendance de l’European Food Safety Authority » identifie des lacunes importantes dans la politique d’indépendance de l’EFSA et trouve que les nouvelles règles de l’EFSA pour l’évaluation de ses experts, mises en place en 2012 après plusieurs scandales de conflits de d’intérêts, n’ont pas réussi à améliorer la situation.

Les auteurs avertissent que cette situation jette un doute grave sur la crédibilité de la production scientifique de l’organisme-clé, responsable de la sécurité alimentaire à l’UE et chargé d’émettre des recommandations et des évaluations des risques sur des questions cruciales de santé publique tels que les additifs alimentaires, les emballages, les OGM, les contaminants et les pesticides.

La principale lacune identifiée dans les nouvelles règles de l’EFSA pour évaluer les intérêts de ses experts est que l’évaluation de l’organisme est trop limitée, car elle se focalise principalement sur le mandat spécifique du panel pour déterminer s’il existe des conflits d’intérêts. Au contraire, elles devraient envisager une perspective plus large des conflits d’intérêt des experts, sur la base du mandat général de l’organisme pour garantir que ses décisions restent indépendantes des industries qu’elle réglemente. L’approche actuelle permet à des dizaines d’experts avec plusieurs intérêts commerciaux (contrats de consultant, de financement de recherche, etc) de se voir encore attribuer des fauteuils dans les panels EFSA, dont la majorité des présidents et des vice-présidents des panels.

Principal auteure, Stéphane Horel commente : « Nous avons été choqués par nos résultats. Même sans vérification des intérêts non déclarés, le nombre de conflits d’intérêts dans cette agence est très inquiétant. Tous les panels, sauf un, sont dominés par des experts ayant des conflits d’intérêts. Nous avons constaté que la majorité des conflits consistent en financements de la recherche et en contrats de consultants privés, mais certaines institutions cruciales pour les scientifiques (sociétés savantes , revues ) sont également visés par le lobbying de l’industrie, ce que l’EFSA semble ne pas prendre en compte. »

Le rapport montre également que l’EFSA n’a pas dûment mis en œuvre ses propres nouvelles règles dans plusieurs cas, et qu’il n’y a pas de différence visible entre les pannels assemblés dans la nouvelle politique et ceux qui ont été composés sur la base de l’ancienne politique .

Martin Pigeon, chercheur et chargé de campagne au Corporate Europe Observatory, déclare : « En dépit des gages de bonne volonté affichés récemment par l’EFSA pour s’attaquer au problème, l’agence ne semble pas avoir appris de ses erreurs passées. Il y a des cas spécifiques sur lesquels l’agence a été interpelée il y a des années et qui restent un problème. Le système mis en place est très lourd à gérer, mais de nombreux défauts le rendent inefficace à prévenir les influences de l’industrie. L’EFSA paye également les pots cassés de la politique défaillante de l’UE et des Etats-membres en matière de recherche, mais cela ne saurait constituer une excuse pour permettre à une telle situation de perdurer. Il faut défendre l’intérêt public. Nous espérons que ce rapport révèlera la nécessité de défendre l’intégrité de la recherche publique contre les menaces que fait peser sur la santé publique l’influence de l’industrie » .

Le rapport émet des recommandations à court, moyen et long termes qui, si elles sont appliquées, pourraient aider à concevoir un système plus résistant aux pressions commerciales et plus proche d’une pratique indépendante de la science.