Source : Journal International de médecine
Auteure : Dr Claudine Goldgewicht
La relation entre exposition aux polluants environnementaux et risque de diabète est l’objet d’un nombre croissant de travaux. Après l’exposition aux polluants organiques persistants, polychlorobiphényles (PCB) et pesticides notamment, c’est l’exposition aux particules fines de l’air qui est à son tour suspectée d’accroître le risque de diabète, comme l’illustre une étude conduite aux États-Unis, par des équipes d’Harvard, de La Grenade (Antilles) et du Joslin Diabetes Center (Boston). Celles-ci ont évalué, pour les années 2004 et 2005, la relation entre exposition aux particules atmosphériques de moins de 2,5 µm de diamètre (PM2,5) et prévalence du diabète chez l’adulte, en examinant les facteurs susceptibles d’influencer cette relation.
Une vaste étude nationale à grande échelle
Les niveaux annuels moyens de PM2,5 ont été obtenus auprès de l’Environmental Protection Agency des États-Unis (US EPA), et la relation à la prévalence du diabète a été évaluée comté par comté, en s’appuyant sur les données de prévalence du diabète du Système national de surveillance du diabète des Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
L’effet confondant potentiel des facteurs de risque de diabète, a été examiné avec attention, notamment l’impact de l’obésité (définie par un IMC dépassant 30), de l’activité physique (hors travail, au cours des mois précédant l’étude), de la densité de restaurants « fast food », de la densité de la population, de la localisation géographique, en s’appuyant sur les données des CDC et celles du recensement. Ont été pris en compte aussi nombre de covariables dont les revenus, l’ethnie, le niveau d’éducation, les données intéressant l’assurance maladie…
Une association forte, homogène entre concentrations de PM2,5 et prévalence du diabète…
À chaque accroissement de 10 µg/m3 de l’exposition aux PM2,5, était associée une augmentation de 1 % de la prévalence du diabète, pour l’année 2004 et pour l’année 2005, en analyse univariée et en analyse multivariée. L’association persistait pour différentes estimations des expositions aux PM2,5, dans tous les modèles étudiés, et la prise en compte des covariables de risque de diabète n’a pas affecté significativement l’association entre exposition aux PM2,5 et prévalence du diabète.
… même lorsque la limite d’exposition aux PM2,5 est respectée
Dans les comtés où l’exposition aux PM2,5 était inférieure aux recommandations de l’US EPA (15 µg/m3), la comparaison des catégories les plus fortement exposées aux moins exposées aux PM2,5, montre pour les premières, un accroissement de plus de 20 % de la prévalence du diabète, et l’association persistait après ajustements sur les facteurs de risque de diabète.
Cette étude, conduite aux États-Unis, où la prévalence du diabète (qui touche près de 24 millions de sujets) a plus que doublé au cours des 15 dernières années, est la première selon les auteurs à avoir analysé à grande échelle, en population générale, la relation entre PM2,5 et prévalence du diabète. Elle met en évidence une association forte entre ces deux paramètres, et suggère la contribution de la pollution de l’air à l’accroissement observé de prévalence du diabète.
Cependant, cette étude ne s’appuie pas sur des donnés d’exposition individuelle, et ne permet pas d’établir une relation causale ; elle n’a saisi que les cas diagnostiqués de diabète (selon les estimations des CDC, 6,3 millions adultes étaient, en 2007, diabétiques mais l’ignoraient) et n’a pas distingué diabète de type 1 et diabète de type 2 (ce dernier comptant toutefois, selon les estimations 2007 des CDC, pour au moins 90 à 95 % de tous les cas diagnostiqués de diabète chez l’adulte aux États-Unis) ; elle n’a pas pris en compte l’exposition à d’autres polluants atmosphériques, reliés dans des travaux antérieurs, à la prévalence du diabète (dioxyde d’azote, par exemple). Les mécanismes qui sous-tendent cette association forte entre PM2,5 et diabète restent à éclaircir, mais J F Pearson et coll voient dans les résultats de cette étude la cible d’une nouvelle approche de prévention du diabète, remettant en cause les limites d’exposition particulaire actuelles eu égard au retentissement sur la santé publique.
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